Le e-commerce est un secteur pourvoyeur d’emplois massifs. La Côte d’Ivoire peut tirer grandement parti de cette activité encore à ses débuts si le gouvernement lui donne le coup de pouce nécessaire. Le Projet Ecom@Africa en est un bon levier.
Selon Comoé Capital, le e-commerce pèse 30-35 milliards de FCFA en Côte d’Ivoire, soit 1% de l’économie numérique évaluée à 3000 milliards FCFA en 2022. Ces chiffres peuvent s’accroitre à condition de prendre des mesures vigoureuses. Dans cette perspective, l’Union postale universelle (UPU) monte au créneau. Il développe le projet Ecom@Africa, en 2018. Son ambition est de positionner le réseau postal comme le facilitateur du commerce électronique.
Ecom@Africa : réponse africaine aux défis du e-commerce
« Les obstacles au commerce électronique sont nombreux et variés. Nous avons besoin d’une plate-forme unique qui puisse répondre à tous les défis d’une manière globale. Développée sous l’impulsion de la poste, Ecom@Africa est la solution », déclarait, en juillet 2018, Bishar A. Hussein, directeur général de l’UPU. Le Projet Ecom@Africa est lancé en Côte d’Ivoire, la même année. Mais il faut attendre août 2021 pour qu’il soit mis en route, à Abidjan, au cours du congrès de l’Union postale universelle (UPU).
La Côte d’Ivoire doit être le hub de l’Afrique de l’Ouest, comme doivent l’être la Tunisie, le Cameroun, le Kenya et l’Afrique du Sud, respectivement pour l’Afrique du Nord, du Centre, de l’Est et du Sud. C’est que La Poste a l’avantage d’être sur tout le territoire ivoirien. Elle peut, dès lors, faire en sorte que les biens soient livrés partout, ou entreposés avant envoi vers l’extérieur. « Je voudrais affirmer ici l’engagement de mon pays à exécuter l’ensemble de ses engagements avec diligence, grâce à l’appui du bureau international de l’UPU », disait le ministre ivoirien de l’Economie numérique et de la Poste, en 2018, Claude Isaac Dé.
Ecom@Africa : les engagements de la Côte d’Ivoire
Ces engagements sont définis par l’UPU. D’abord, mettre en place un hub de plateformes logistiques, notamment des entrepôts destinés au e-commerce avec services d’emballage et centres de tri automatisés dotés de machines de tris ultramodernes garantissant un tri correct (pesage, mesurage, certification des colis, étiquetage avant l’expédition, etc.) jusqu’au transport et la livraison. Le préalable étant la facilitation du dédouanement. Ensuite, la distribution avec véhicules de livraison par camions, fourgons et motocyclettes, mais aussi des capteurs permettant de saisir les données essentielles.
Le réseau postal et des solutions de paiement fiables en ligne, seront, par ailleurs, utilisés pour prendre en charge les opérations des e-commerçants. Ce dispositif nécessite le déploiement d’une application de vente et de commande. Ici, l’UPU propose l’interface POST. Celle-ci se présente sous la forme d’une boutique en ligne intégrant les outils de commande actuels des e-commerçants à leurs propres systèmes de traitement des commandes. Enfin, un service de retour de marchandises permettant aux commerçants d’accepter le retour des articles achetés sur internet, et un personnel compétent pour gérer les opérations du e-commerce et les paiements transfrontaliers, bouclent la boucle des engagements de mise en œuvre du Projet Ecom@Africa en Côte d’Ivoire.
Ecom@Africa : La Poste-CI en attente des financements
« La Poste de Côte d’Ivoire est chargée d’assurer l’exploitation du Centre de Tri qui sera construit dans le cadre de ce projet (Ndlr : zone aéroportuaire). Celle-ci a été choisie en raison de son expertise dans la logistique nationale et internationale, et de son appartenance à l’Union postale universelle (UPU) qui est l’initiatrice du projet Ecom@Africa », confie à digitalmag.ci, le directeur de La Poste numérique Ghislain Lagarde. Mais, alors, où en est la Côte d’Ivoire dans l’exécution de ce projet qui doit, à terme, servir de rampe de lancement du e-commerce ?
« Le projet Ecom@Africa est un projet national avec comme lead la tutelle de La Poste de Côte d’Ivoire. Le nécessaire en termes d’étude et d’évaluation technique et financière a été fait par toutes les parties prenantes. La prochaine étape est le financement du projet. La Poste de Côte d’Ivoire est donc en attente de la suite », répond-il. Comme le prévoit l’UPU, Ghislain Lagarde est confiant que « le projet Ecom@Africa va permettre à la Côte d’Ivoire de se positionner comme le leader du e-commerce sous régional ». « Ce projet permettra aux entrepreneurs et aux PME de se développer grâce à l’import et l’export de leurs produits, ce qui aura un effet positif sur la création d’emplois directs et indirects », ajoute-t-il.
Pour lui, La Poste de Côte d’Ivoire n’a pas vocation à être un concurrent des e-commerçants. Bien au contraire, elle se présente comme un partenaire. « Sa mission principale est d’être le lien social entre l’Etat et les populations. C’est dans ce cadre qu’elle propose des solutions adaptées aux populations surtout locales. Pour le cas du e-commerce, elle a mis en place le site Sanlishop.ci pour aider les artisans faisant du Made in Côte d’Ivoire à avoir une visibilité, car cette catégorie n’est pas mise en avant sur les autres sites de e-commerçants pour des questions de rentabilité. »
Le e-commerce est encore à ses débuts
« Le rythme de déploiement du Projet Ecom@Africa est trop lent. Et ce n’est pas de nature à favoriser l’essor du e-commerce au pays », regrette un partenaire de la plateforme Babiken.ci. « Il faut vraiment que le gouvernement se penche sur les problématiques de notre secteur d’activité. Nous apprécions le déploiement du Projet d’adressage des rues d’Abidjan (PADA), qui, à terme, va faciliter la livraison des colis, mais le grand saut, à mon avis, ce sera lorsque nous aurons La Poste avec nous pour booster nos activités. J’ai pris connaissance du Projet Ecom@Africa. Ses promoteurs ont vraiment pris en main toutes les problématiques du e-commerce », dit-il.
« Le marché du e-commerce est encore à ses débuts en Côte d’Ivoire. Sa croissance est fonction de la réduction de la fracture numérique. Le e-commerce ivoirien n’exploite pas encore tout son potentiel parce que la majorité des petites et moyennes entreprises et principalement les détaillants n’utilise pas encore le commerce électronique comme canal de vente », répond Ghislain Lagarde. Comme pour dire qu’une mine d’or sommeille sur les terres ivoiriennes en attendant un réveil moins brutal.
K. Bruno