Une rue bondée de vélos, de motos et de camionnettes. Des bruits de klaxon qui retentissent de partout. Ce matin, on pouvait sentir l’excitation dans l’air alors que Maïga, François et Kouamé, trois livreurs urbains se préparaient à parcourir la ville pour accomplir leur service quotidien : la livraison à domicile.
Maïga, le mécanicien qui a trouvé sa passion
Abidjan-Cocody, il est 9h. Maïga, âgé de 22 ans, lancé sur son vélo pour réaliser une course en direction d’Angré Mahou, accepte de nous accorder quelques minutes d’échanges. Dès l’entame, il explique les motivations qui l’ont conduit à ce métier : « Je suis devenu livreur par nécessité. Mes parents n’ayant pas suffisamment de moyens, j’ai décidé de me lancer dans la livraison à Abidjan pour les soutenir. Au fil du temps, je suis devenu passionné par ce métier et j’apprécie les rencontres quotidiennes. » Puis d’ajouter : « Je gagne environ 2000 à 3000 francs [CFA] par jour, parfois même 5000 si les clients me laissent un pourboire. »
Parlant des défis de ce métier, il dit n’avoir pas encore rencontré de difficultés majeures grâce notamment à son smartphone et à l’application qui facilite ses déplacements. « J’ai aussi la possibilité d’accepter ou d’annuler une commande si le prix ne me convient pas », explique-t-il. A l’écouter, le métier de livreur que de nombreuses personnes perçoivent comme étant difficile peut être une activité passionnante pour d’autres.
François, le passionné de la route
Avec François, c’est une autre histoire. Il a décidé de devenir livreur pour aider sa mère à payer les frais d’inscription académique. Il dit aimer son travail de livreur et son patron est compréhensif et attentionné envers eux. Étant donné son jeune âge, il exerce cette activité avec son vélo. François a le choix de travailler tous les jours ou de choisir les jours qui lui conviennent en fonction de son emploi du temps. Les mercredis et samedis, il joue au foot, et consacre les autres jours à son activité. En cas de maladie, son responsable lui permet de se reposer ; il le considère comme un père. Le seul obstacle qu’il dit rencontrer pour l’heure, c’est le soleil. Il livre à vélo et le soleil est son compagnon quotidien. François a hâte de grandir pour pouvoir livrer à moto. En moyenne, il gagne environ 3000 FCFA par jour, et certains clients lui laissent même un pourboire pour l’encourager.
Kouamé, le livreur au grand cœur
De l’autre côté de la rue, Kouamé vient de recevoir une commande mais a tenu à nous accorder 5min. Pour lui, le travail de livreur est noble, pour le moment tout va bien et il n’a rien à signaler. Il arrive facilement à manier le smartphone lors des commandes, ce qui lui facilite ses livraisons. Il n’a de problème avec la police non plus. Par jour il s’en sort avec la somme de 5000 FCFA, que demander de plus ? A la longue, il espère acquérir une voiture pour être plus confortable dans cette activité, a-t-il souligné avant de prendre congés de nous.
« Nous sommes déterminés à y arriver »
Pour Julien Yao, président des livreurs d’Abidjan, l’objectif de l’association est d’améliorer l’organisation et la sécurité de la profession. Selon lui, l’association est en pleine discussion avec le gouvernement pour dégager des pistes réservées aux engins à deux roues afin de réduire les accidents. A côté, l’association des livreurs urbains mène des campagnes de sensibilisation, partage des équipements de sécurité et organise des formations sur le code de la route.
« Nous voulons changer l’image des livreurs en améliorant notre communication avec les clients et notre apparence. Nous travaillons également sur la couverture médicale avec la Coopec (Coopérative d’épargne et de crédit, ndlr). C’est un défi important, mais nous sommes déterminés à réussir ! » déclare Julien Yao.
La croissance exponentielle de la livraison urbaine à Abidjan
Dans une interview accordée à un confrère ivoirien, Angaman Benjamin, membre du Collectif des entrepreneurs de la livraison urbaine de Côte d’Ivoire et fondateur de la Fédération des professionnels de la livraison et du e-commerce de Côte d’Ivoire (FEROLE-CI), a souligné l’essor remarquable du secteur de la livraison urbaine à Abidjan. Avec plus de 2500 livreurs urbains dans la capitale économique, ce secteur connaît une croissance exponentielle, reflétant l’évolution des habitudes de consommation et l’importance croissante du commerce en ligne. A ce jour, l’écosystème des services de livraison à domicile ne dispose pas de chiffres récents sur le nombre exact de livreurs urbains en Côte d’Ivoire.
Aida Soro