L’ex-président du Groupement des opérateurs du secteur des technologies de l’information et de la Communication de Côte d’Ivoire (Gotic-ci). Patrick M’Bengue est aussi président directeur général (Pdg) du groupe Inova spécialisée dans le développement de logiciels et les services IT. Membre du comité de gestion de l’Ecole supérieure africaine des technologies de l’information et de la communication (Esatic).
Dans cet entretien qu’il nous a accordé, il parle de l’apport de l’industrie 4.0 dans le développement de l’agriculture en Côte d’Ivoire. C’était à la faveur d’un séminaire scientifique organisé par l’Esatic, les 2 et 3 mai 2024, au sein de ladite école, à Abidjan-Treichville sur le thème : « l’industrie 4.0 au service de l’agriculture ».
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Pourquoi avez accepté d’associer votre image à une telle activité ?
En tant qu’acteur majeur de l’écosystème du numérique en Côte d’Ivoire, je suis membre du comité de gestion de l’Esatic, à ce titre, toutes les activités que l’Esatic fait pour éclairer ses étudiants sur l’horizon professionnel de ces jeunes. Je suis toujours présent, ça m’intéresse de venir partager mes expériences pour donner de la visibilité sur l’évolution des technologies des différents secteurs d’activité, c’est donc ce qui motive ma présence ici aujourd’hui.
« L’industrie 4.0 au service de l’agriculture » quel est le rapport entre ces deux notions ?
L’industrie 4.0 est un paradigme d’organisation industrielle avec une prédominance de la technologie. La Côte d’Ivoire est un pays agricole. On l’a tous appris à l’école que ‘’l’avenir de ce pays repose sur l’agriculture’’ car le secteur agricole pèse approximativement 25% du Produit intérieur brut (Pib) et 40% des exportations et environ 50% des emplois, autant dire que le secteur de l’agriculture est au cœur des enjeux de développement de la Côte d’Ivoire.
Et l’industrie 4.0 nous permet d’avoir une agriculture plus efficace, plus productive et plus durable en termes de respect des contraintes environnementales, en raison des changements climatiques. Donc l’industrie 4.0 par les technologies qu’elle instaure va favoriser une agriculture de précision qui va accroître le potentiel de développement de notre pays. C’est donc tout le sens de cet atelier qui porte sur l’industrie 4.0, ses promesses pour l’agriculture en Côte d’Ivoire.
On va voir comment le secteur agricole, dans toutes ses chaînes de valeurs, peut bénéficier des technologies innovantes pour transformer radicalement l’exploitation de nos petites structures agricoles et mêmes des grandes structures qui sont dans l’agriculture d’exportation. Il s’agit de voir aussi comment les jeunes de l’Esatic, qui constituent l’avenir du numérique en Côte d’Ivoire, peuvent être formés pour être des acteurs de cette transformation du monde agricole. L’adoptions de ces technologies doit permettre à nos agriculteurs d’améliorer leur productivité, de créer de la valeur et plus de richesse pour mieux garantir leur revenu . C’est l’enjeu de cet atelier scientifique.
Vous êtes certainement parti d’un constat, quelle est aujourd’hui la situation de l’agriculture en Côte d’Ivoire ?
La situation aujourd’hui, c’est qu’on a une agriculture faiblement productive, une agriculture qui subit les contraintes du changement climatique, et beaucoup de contraintes d’ordres logistiques et d’accompagnement, donc comment à l’aide des différentes technologies (Big data, la robotique, l’internet des objets, l’intelligence artificielle, la blockchain et les systèmes d’information de marché…), on peut permettre à notre agriculture d’éradiquer ces problèmes à la source.
Donc ce sont ces solutions que nous sommes venus partager, on est venu présenter des modèles de solutions qu’on pourra généraliser tant dans l’agro-industrie que dans l’agriculture vivrière. Il est important que ces technologies soient intégrées pour qu’on sorte des problèmes de commercialisation et de stockage, de nos produits vivriers, qu’on relève les enjeux de traçabilité de nos produits à l’exportation, qu’on relève les enjeux de résilience aux problèmes climatiques, qu’on relève également les enjeux de création de valeurs et de revenus pour notre vaste monde agricole qui a besoin de soutien.
Ce sont tous ces débats qui sont menés au cours de cet atelier. On ne vient pas seulement pour débattre mais on vient pour présenter des solutions et partager des retours d’expériences.
Quel pourrait être l’apport d’une école comme Esatic dans ce projet ?
Comme je le disais tantôt, cet atelier permet de connecter les jeunes à la réalité du monde de l’agriculture qui constitue 25% du PIB de la Côte d’Ivoire. Donc, ce projet permet à ces jeunes d’avoir des trajectoires, des itinéraires de formation pour être des acteurs de développement de ce secteur. Ça permet aussi à ces jeunes étudiants de pouvoir se constituer en startups pour pouvoir être des fournisseurs de solutions dans ce projet de transformation digitale de notre agriculture.
Quels sont les défis à relever ?
Le défi majeur pour la Côte d’ivoire est de refaire de notre agriculture un pilier central de notre économie, en actionnant son potentiel de développement par l’adoption de ces innovations technologiques disponibles et émergentes.
En tant qu’expert, qu’est-ce qu’il faut faire pour rendre ce rêve possible ?
Mais c’est ce que nous sommes en train de faire, l’Etat a un plan national d’investissement dans l’agriculture. Les écoles sont en train de se connecter avec le monde agricole pour comprendre les enjeux et les problèmes, l’écosystème numérique local via nos opérateurs et nos start up avec les acteurs du monde agricole et de la recherche sont en train de façonner notre agriculture de demain.
C’est de la convergence de ces actions qu’on aura demain une agriculture de précision qui pourra nourrir le monde rural et permettre à chaque acteur de l’écosystème d’être sur des filières d’agricultures productives. Et qui va permettre aussi de résorber le vaste défi de l’employabilité au niveau de la jeunesse, qui sera formée et qui sera connectée avec les réalités de notre monde agricole.
Pour moi, c’est ça les enjeux, il faut que nos dirigeants dans les stratégies convergent pour que nous puissions avoir des solutions concrètes au quotidien pour les acteurs du monde de l’agriculture, de l’agro-industrie en générale et de l’agriculture en particulier, donc les enjeux, ce sont l’emploi, le développement durable la maîtrise du changement climatique, l’amélioration du pouvoir d’achat des populations, l’amélioration des revenus des filières paysannes et puis le développement de la Côte d’Ivoire.
Êtes-vous optimiste ?
Je suis très optimiste parce que la Côte d’Ivoire a su embrasser ces virages et elle a mis en ordre de marche à la fois le système de formation universitaire, les écosystèmes numériques, tout ça dans le cadre d’un plan national de développement du secteur agricole et c’est dans la conjonction de ces efforts qu’on va réussir ce challenge.
Entretien réalisé par Eugène YAO