Les réseaux sociaux sont des instruments d’information et de liberté d’expression. Mais, trois faits récents viennent remettre en cause ces droits acquis : le mea culpa de Mark Zuckerberg, l’arrestation de Pavel Durov et la fermeture de X au Brésil. Il semble que les puissants veuillent contrôler ces plateformes pour étouffer la voix trop audible des peuples, et les priver du droit à l’information.
Le vendredi 30 août 2024, un juge brésilien ordonne la suspension dans le pays du réseau social X, anciennement Twitter. Le 24 août 2024, Pavel Durov, fondateur de Telegram, est arrêté en France, mis en examen et placé sous contrôle judiciaire. Le 26 août 2024, Mark Zuckerberg reconnait dans une lettre avoir censuré des informations qui auraient donné, en 2020, un résultat différent à la présidentielle aux Etats-Unis.
Pressions politiques sur les génies de la tech
La France reproche à Pavel Durov, 39 ans, de ne pas agir contre l’utilisation de Telegram pour des faits d’escroquerie, trafic de stupéfiants, criminalité organisée, apologie du terrorisme, cyber-harcèlement, détention et diffusion de contenus à caractère pédopornographique. Autrement dit, la France est contre la trop grande liberté d’expression sur sa plateforme et la sécurité inviolable des données des utilisateurs. Au Brésil, il est reproché à Elon Musk, patron de X (Ex-Twitter), de « dépasser trop les limites » de la liberté d’expression sur sa plateforme.
Pour les défenseurs de la liberté d’expression, du droit à l’information et de la protection des données, les accusations contre ces deux génies de la tech sont d’ordre politique. Pour preuve, le tweet du président français le jour de l’arrestation de Pavel Durov. « L’arrestation du président de Telegram sur le territoire français a eu lieu dans le cadre d’une enquête judiciaire en cours. Ce n’est en rien une décision politique. Il revient aux juges de statuer », écrit-il. Pourquoi alors le président Macron s’en mêle-t-il ? Où est passée la séparation des pouvoirs exécutif et judiciaire ? Questions légitimes.
Obtenir des résultats électoraux par la censure des réseaux sociaux
Au Brésil, la fermeture de X à moins d’un mois des élections municipales, est également perçue comme une décision politique. Le juge auteur de cette décision est connu comme un proche du président Lula, et pour sa détestation de l’ancien président Jair Bolsonaro. Selon les partisans de ce dernier, le juge de la Cour suprême est à la manœuvre pour « influencer l’issue de ces élections au profit du camp du président Lula ». Mais aussi pour « empêcher le retour au pouvoir de Jair Bolsonaro », à la prochaine présidentielle au Brésil.
Aux Etats-Unis, en octobre 2020, à moins d’un mois de la présidentielle, Facebook et Twitter avaient bloqué une information qui aurait permis la réélection de Donald Trump. Un journaliste écrivait, en effet, qu’un e-mail du 17 avril 2015 de Vadym Pozharskyi, conseiller de l’entreprise ukrainienne Burisma, remerciait Hunter Biden, alors membre du conseil de surveillance de la même société, de lui donner l’opportunité de rencontrer son père Joe Biden, à l’époque vice-président et en charge de la politique américaine en Ukraine.
Un tournant dans le droit à l’information !
Le journaliste ajoutait que l’ancien vice-président a fait pression sur le gouvernement ukrainien pour limoger un procureur général, en 2016, afin d’aider Burisma à échapper à des enquêtes qui auraient éclaboussé son fils. A l’époque, toute la presse accusait Donald Trump, qui faisait de cette information un argument de campagne contre son adversaire, de mensonge, et de colporter une désinformation d’origine russe. Mais, le masque du mensonge, même bien porté, n’arrête pas la vérité.
Quatre ans plus tard, le fondateur de Facebook et Twitter admet avoir censuré cette information vraie sous la pression des politiques. Dans une lettre, à la Chambre des représentants, Mark Zuckerberg avoue : « Il est clairement établi qu’il ne s’agissait pas de désinformation russe et, rétrospectivement, nous n’aurions pas dû rétrograder l’article ». « Des hauts fonctionnaires de l’administration Biden, y compris la Maison Blanche et le FBI, ont exercé des pressions répétées sur nos équipes pendant des mois », accuse-t-il. Entretemps, le mal est fait. L’un a perdu et l’autre a gagné.
Avec les réseaux sociaux, on a vécu dans l’illusion que la liberté d’expression et l’accès à l’information étaient un droit acquis. Il semble que cette idée soit dépassé et du passé…
K. Bruno